Ecole du regard(l')

Comme en témoignent de manière exemplaire les parcours de plusieurs poètes québécois, l'histoire de la poésie moderne est marquée par un dialogue long et fructueux avec la peinture. En commentant des tableaux ou des dessins, en les interrogeant dans le cadre de poèmes, d'essais ou de chroniques d'art, les poètes ont développé de nouvelles sensibilités esthétiques. Ce livre propose d'examiner de quelle façon la peinture a agi comme une «école du regard» chez des auteurs québécois associés à différentes périodes de la poésie moderne. En s'attardant à l'oeuvre de Saint-Denys-Garneau, tout d'abord, il met en lumière les discours qui ont formé l'«éducation esthétique» d'un poète qui fut aussi peintre et critique d'art. À la suite de Garneau, Roland Giguère a lui aussi «appris à voir» grâce à la peinture. Avec le mandat cette fois de donner à voir les profondeurs de l'inconscient, son esthétique repose en grande partie sur les interactions entre le texte et l'image, les couleurs et les mots. Il en va autrement du parcours de Robert Melançon, qui n'a jamais pratiqué la peinture et dont l'univers est éloigné du surréalisme de Giguère. Mais l'auteur de Peinture aveugle a également fréquenté «l'école du regard» que représentent les arts visuels, il a écrit des textes sur l'art et envisagé la poésie comme un «instrument d'optique». Par le biais des parcours de Garneau, de Giguère et de Melançon - mais aussi par ceux d'autres auteurs: Gauvreau, Ouellette, Brault, pour en nommer quelques-uns -, ce livre jette un regard neuf sur l'histoire de la poésie québécoise. Plus largement, il explore différents «modes de visibilité» ayant marqué l'art moderne, différentes façons de configurer les rapports entre le visible et le dicible.