Vieilles choses vieilles gens

Amoureux d’un monde qui lui est familier, mais dont l’essentiel se perd et s’effrite, Georges Bouchard examine, avant de les ranger, tous les décors et les costumes, tous les acteurs, tous les signes et les symboles de l’univers traditionnel des Habitants canadiens-français. Voici une société qui fut heureuse pour avoir été la maîtresse de ses imaginaires. Sur cette planète, le temps s’enroule autour d’un lieu unique : la terre, l’église, le village, là où l’ordre sacré du monde est fixé une fois pour toutes, et où le moindre geste imprègne de sens la grande représentation des jours. L’unité du monde assure l’ensemble des besoins humains, du plancher des vaches jusqu’au firmament de Dieu. En ce voyage qui mène de la naissance à la mort, l’âme baigne dans l’ordonnancement fondamental de l’éternel retour.Le crieur, le bedeau, le remmancheux, la ménagère du presbytère, la fileuse ; le dimanche de la viande fraîche, la fête de la grosse gerbe ; la nostalgie de Georges Bouchard rend beaux les métiers et les rituels, tout cela qui appartient aux jours révolus. Sans amertume, sans mièvreries, loin de la propagande et de la bête apologie, l’auteur débusque la richesse d’un dire, d’un agir, la puissance symbolique d’un objet, il met en lumière la part de bonté du « bon vieux temps ». Ce livre est un joyau, un de ces ouvrages dont le rayonnement augmente avec l’âge. Il témoigne d’un certain état de grâce : la naïveté, la simplicité, le merveilleux, la sagesse brute d’un monde complexe qui mérite de nous, les modernes, un juste traitement d’intelligence et de mémoire. SERGE